Conversion — Diocèse de Blois

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Conversion

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chronique du vendredi 12 novembre 2021

Beaucoup de choses ont déjà été dites sur l’assemblée des évêques qui s’est déroulée à Lourdes en ce début de novembre. Je voudrais simplement insister ici sur le fait qu’elle a été pour eux un lieu de conversion.

Conversion par rapport aux personnes victimes des drames atroces que constituent les abus sexuels, dans l’Église en particulier. Oui, nous avions du mal jusqu’ici à partir des victimes et de leur souffrance et nous avions plutôt tendance à partir de nous-mêmes et de ce que nous risquions de perdre, au motif que ce que nous risquions de perdre n’était pas notre bien propre, mais celui des fidèles – car il n’est rien de ce que possède l’Église qui ne découle en dernier ressort des dons des fidèles. Oui, nous pensions spontanément aussi en termes de droit positif : le droit en vigueur dans notre pays nous protège, nous autres évêques, puisque seuls les agresseurs sont comptables devant la justice des crimes qu’ils ont commis. Mais il ne suffit pas de se retrancher derrière le droit : si l’on part des victimes et de ce qu’elles ont subi, il devient clair qu’elles ont droit à ce que l’on appelle une justice restaurative, c’est-à-dire à une justice qui leur permette de se reconstruire et qui ne se contente pas de sanctionner les coupables. Cela suppose de ne pas prendre pour point de départ ce que l’on estime pouvoir leur offrir en justice, mais de prendre pour point de départ les demandes, voire les exigences qu’elles formulent elles-mêmes. L’une d’entre elles nous a aidés à le percevoir en commentant la rencontre de Jésus avec l’aveugle Bartimée : Jésus ne dit pas à Bartimée « voilà ce que j’ai décidé de faire pour toi », il lui dit « que veux-tu que je fasse pour toi ? », et c’est tout différent. Il prend pour point de départ son attente, sa demande. Si Jésus se comporte ainsi, comment nous, successeurs des apôtres, pourrions-nous nous comporter autrement ?

En changeant ainsi de paradigme dans sa manière d’appréhender les abus et les crimes sexuels, l’Église catholique donnera un signe fort de la logique de l’Évangile : c’est en effet en acceptant de perdre, d’abandonner ses prérogatives, que le Christ est descendu au plus bas chercher et sauver l’humanité blessée. Et l’Église pourra ainsi remplir un rôle précurseur, un rôle de vigie pour la société tout entière. Nos sociétés, en effet, commencent à découvrir et à mettre en œuvre cette justice restaurative. Les victimes de l’attentat du Bataclan, par exemple, ne peuvent rien attendre de leurs agresseurs : la quasi-totalité d’entre eux sont morts et ne peuvent plus être condamnés par la justice ; et ceux qui sont encore vivants peuvent certes être condamnés, mais sans que cela puisse contribuer à la reconstruction des rescapés de la tuerie. Devant cet état de fait, notre société – et c’est tout à son honneur – se sent de plus en plus comptable du devenir de ces personnes et tente de les prendre en charge autant qu’il est en son pouvoir. Il appartient à l’Église catholique de ne pas rester à la traîne, mais de jouer un rôle précurseur sur ce chemin.

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