Le christianisme, un privilège de classe ? — Diocèse de Blois

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Le christianisme, un privilège de classe ?

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chronique du 24 septembre 2021

Récemment, le journal Le Monde a proposé une « série d’été » intitulée « Les religions ne meurent jamais vraiment ». Titre étrange, qui pourrait faire penser à une vague menace microbienne qui semblerait disparaître et reviendrait à l’improviste, ou encore à des fantômes qui hanteraient un vieux château.

Dans le dernier épisode de la série, Cécile Chambraud posait la question de la survie du catholicisme, en se fondant sur son recul statistique en Europe occidentale. L’analyse des causes de ce recul n’avait rien de très nouveau, ramenant surtout la problématique à la thèse bien connue du divorce avec la modernité. Mais une autre thèse a retenu mon attention et me paraît devoir être prise très au sérieux.

Cette thèse semble partagée par Yann Raison du Cleuziou et Guillaume Cuchet. Le premier explique que « dans les univers sociaux où les familles s’en remettaient aux institutions – paroisse, école, patronage – pour la transmission, la foi s’est effondrée ». Le second souligne le risque que le catholicisme « devienne une religion de classe, une sorte d’anglicanisme ».

Quelles étaient les familles qui s’en remettaient aux institutions pour la transmission ? De toute évidence, celles qui n’avaient pas la capacité d’assurer cette transmission par elles-mêmes. Pour ces familles – et mes ancêtres en faisaient partie – monsieur le Curé et monsieur l’instituteur, même s’ils ne s’adressaient pas la parole, visaient un même objectif de promotion inséparablement sociale et spirituelle. Ces familles-là étaient du nombre de ces pauvres qui sont les premiers destinataires de la Bonne Nouvelle, qu’elle soit dispensée par les hommes en soutane ou par les hussards noirs de la République. Ce sont ces pauvres que, depuis plus d’un demi-siècle, les niaiseries télévisuelles et les conformismes sociaux présentés comme des libérations ont réduits en esclavage et assassinés.

La vraie question qui se pose au christianisme contemporain n’est pas celle de sa disparition, mais celle de sa « gentrification », si l’on me permet ce terme. Gentrification qui va de pair avec le contresens obstiné de ses accusateurs, qui voient son salut dans son alignement sur les idées du monde, alors qu’il n’est libérateur que s’il accepte de les remettre radicalement en question. En 1968, on pouvait lire sur un mur de Paris : « Dieu est mort. Signé : Nietzsche. » Mais la phrase avait été barrée et remplacée par une autre : « Nietzsche est mort. Signé : Dieu. »

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