Que voile le voile ? — Diocèse de Blois

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Que voile le voile ?

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Chronique du 18 octobre 2019

Le voile vient de s’inviter à nouveau dans le débat public français toujours friand de sujets de discorde, particulièrement sur le thème sacro-saint de la laïcité. Ce qui est en cause dans ce débat, ce n’est pas telle ou telle manière de se vêtir, mais la connotation « religieuse » qu’on pense y discerner : elle déclenche aussitôt un phénomène d’hystérisation collective.

Personnellement je suis toujours très agacé quand je croise un de ces jeunes encagoulés qui estiment nécessaire pour prouver qu’ils existent de sacrifier à une mode stupide (pardon pour ce pléonasme). Ce parti pris de dissimuler son visage me paraît offensant, même de la part d’un inconnu, car il existe un accord tacite dans l’espace public : celui de ne pas se cacher pour ne pas avoir l’air d’un agresseur potentiel. Les banques l’ont bien compris, qui exigent toutes qu’on se découvre avant d’entrer. Comment se fait-il qu’il ne soit jamais venu à l’idée de personne de réprimander les jeunes dont je parle, alors qu’il suffit d’un foulard sur la tête d’une malheureuse femme pour que tombe sur elle la réprobation républicaine ? La réponse est simple autant que navrante : parce que vous avez le droit, au nom des libertés individuelles, de vous accoutrer comme bon vous semble, mais que ces libertés sont soudain remises en cause si on vous soupçonne, à tort ou à raison, d’avoir mis en confetti sur le bout de votre nez pour clamer votre appartenance à une religion.

Du reste, il n’est pas du tout certain que le fameux foulard soit un emblème religieux : la plupart des connaisseurs de l’islam n’y voient qu’une simple coutume sans rapport avec quelque précepte religieux que ce soit. S’il en est vraiment ainsi, dans un pays qui se glorifie d’être pluraliste, qu’on laisse donc tranquilles celles qui ont choisi de le porter !

À condition bien sûr qu’il n’y ait pas deux poids et deux mesures. Je connais un prêtre, aumônier d’un grand lycée parisien, qui s’est fait reconduire sans ménagements à la sortie un jour de kermesse ouverte à tous où il s’était rendu en col romain, alors que plusieurs stands de cette même kermesse étaient tenus par des mamans voilées. On m’objectera peut-être que le col romain est un signe religieux. Eh bien justement non ! Il ne l’est pas plus que le plumeau du saint-cyrien ou la casquette du liftier : il indique la fonction sociale d’une personne, alors que pour la croix, la chose peut se discuter.

Nos politiques sont bien trop ignorants pour saisir ce genre de nuances. On ne leur demande pas d’ailleurs d’en savoir beaucoup sur ce sujet. On leur demande seulement de s’occuper de ce qui les regarde, dans un pays qui a tant d’autres chats à fouetter.

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